[L'auteur a généreusement partagé ce matériel de son Les Guillotinés de la Révolution Française. Nos lecteurs voudront peut-être visiter. — George P. Landow]
Anne-Josèphe Théroigne de Méricourt Therwagne dite la belle Liègeoise, née à Pamiers le 4 mars 1765, Morte à Paris vers 1820. Avec Olympe de Gouges et Claire Lacombe, Théroigne de Méricourt est l’une des premières féministes françaises de la période révolutionnaire. Née à Marcourt, au sud de Liège, dans les Pays-Bas autrichiens, Théroigne était issue d’une famille de paysans propriétaires. Elle passa son enfance dans une grande misère morale, qui fut sans doute à l’origine de son état mélancolique. Très vite, elle rêva de changer de condition et de devenir musicienne. À la veille de la Révolution, rongée par la vérole, elle mena une existence de demi-mondaine, entre Londres et Paris, entretenue par un marquis jaloux et escroquée par un castrat, chanteur à la chapelle Sixtine, qui lui fait miroiter une carrière de chanteuse.
Engagée dans le combat en faveur de la liberté, elle suit chaque jour les travaux de l’Assemblée constituante et se construit une identité nouvelle en fréquentant l’abbé Sieyès, Barnave et Pétion. Elle ouvre d’abord un salon intellectuel, puis fonde une société patriotique avec Gilbert Romme, futur inventeur du calendrier républicain et futur conventionnel dans les rangs de la Montagne. Plus elle apparaît comme une mystique de la Révolution, plus elle devient la cible de la presse royaliste, qui fait d’elle une libertine sadienne et l’accuse d’avoir voulu assassiner Marie-Antoinette lors des journées d’octobre, auxquelles elle n’a pas pris part. Les Actes des apôtres , journal fondé par Antoine Rivarol, Jean-Gabriel Peltier et François Suleau, se montre le plus virulent. Poursuivie par le tribunal du Châtelet pour un «crime» qu’elle n’a pas commis, elle retourne dans son pays natal. Mais la rumeur la précède et elle est enlevée par des aristocrates en exil qui la livrent à la justice autrichienne. L’empereur Léopold II, dont elle est sujette, reconnaît son innocence et la fait libérer. De retour à Paris, elle s’engage au côté de la Gironde et tente en vain de lever des «bataillons d’Amazones» pour combattre les monarchies européennes. Elle réclame aussi pour les femmes l’égalité civile et politique.
Lors de la journée insurrectionnelle du 10 août, qui fait tomber la royauté, elle prend part, sur la terrasse des Feuillants, à un meurtre collectif au cours duquel François Suleau, le chroniqueur des Actes des apôtres , est massacré. Elle le reconnaît quand la foule crie son nom. Puis elle participe à l’assaut des Tuileries avec les fédérés marseillais. Lors de la chute de la Gironde, en mai 1793, elle est fouettée à nu, devant la Convention, par des femmes jacobines qui lui reprochent ses idées «brissotines». Marat la protège; mais cette humiliante flagellation la conduit sur le chemin de l’asile. En s’achevant dans la Terreur, la Révolution ne porte plus l’idéal de Théroigne et celle-ci s’enfonce alors dans la folie, comme pour « témoigner», à son insu, que la Révolution est devenue «folle ».
Internée en 1794, Théroigne de Méricourt passera vingt-trois années à l’asile, à l’Hôtel-Dieu d’abord, puis à la Salpêtrière, où elle deviendra, sous le regard d’Étienne Esquirol, l’un des cas les plus célèbres de la médecine mentale. Son histoire, sa légende et sa folie ont été plusieurs fois racontées, notamment par Michelet, Lamartine et les Goncourt. Sarah Bernhardt a interprété le rôle pour le théâtre et Baudelaire lui a consacré un sonnet des Fleurs du mal .
Dernière modification août 6 novembre 2010